« Attachements », une œuvre vidéo avec la participation de deux comédiennes, Émilie Favre-Bertin et Aleksandra Rykowska, parle des histoires héritées de manière inconsciente et de l’expérience de la solitude chez les femmes. Le mot « attachements » au pluriel fait référence à la notion d’attachement développé par John Bowlby (1907-1980), un psychiatre et psychanalyste anglais, et peut être expliqué comme lien que les humains créent envers leurs parents pendant leur enfance. Je l’utilise au pluriel pour décrire les modèles d’attachement créés et transmis par différentes générations d’une famille, notamment entre les femmes.
Dans le film, on peut voir deux sujets féminins : l’une évoquant une figure maternelle, l’autre évoquant l’adolescence. Elles se trouvent dans des espaces domestiques, sans jamais être ensemble. En même temps, dans le contexte naturel, à proximité d’un lac, se trouve un nid de pigeons. On peut observer toutes les étapes du développement des pigeons aux côtés de leur mère, dès leur naissance jusqu’à ce qu’ils quittent le nid. Cette image symbolique devient l’axe principal du film, en évoquant le cycle de la vie avec toutes les étapes naturelles de la croissance, à travers le processus de grandir, de gagner en indépendance, jusqu’à la séparation.
Dans les familles dans lesquelles un ou plusieurs événements traumatisants ont eu lieu, les générations suivantes, ainsi que leur modèle d’attachement, peuvent en être affectés. La partie en noir et blanc du film, qui semble être détachée du contexte du lac, comme hors temps, fait référence au passé. Une figure adolescente reste à l'intérieur d’une maison en bois, dans un état émotionnel figé, et, à un moment donné, sort de l’espace clos, pour se retrouver dans la nature. Ce passage à l’extérieur, symbolisant la libération, peut être retrouvé dans mes autres travaux vidéo- et photographiques, comme la nature joue également un rôle important dans mon travail.
Avant de commencer à travailler sur le film « Attachements », je me suis rendue à l’Est de la Pologne pour réaliser des repérages ainsi que des recherches sur l’histoire de ma famille maternelle. Dans la vidéo, les espaces où se trouvent les deux personnages ne sont pas tout à fait définis, mais leurs environnements évoquent le paysage naturel de la Pologne, ainsi que des fragments d’architecture et d'intérieur français. Le film évoque pour moi les notions de l’éloignement et de la proximité, il dépeint les subtilités d’une relation entre une mère et une fille, avec un contexte de migration dans le fond, et il porte un regard critique sur l’association de la femme à l’espace domestique.