L’exposition Terra Mater vous invite à faire corps avec la terre.
Cette exposition emprunte son titre à la déesse mythologique romaine Terra Mater, mère de toutes choses, apparue au commencement du monde, personnifiant la nature. Née du chaos, elle est à l’origine de la vie sur la terre. Elle incarne mère nature, la mère nourricière et fertile. Cette figure divine abrite en son sein abondance et protection. Elle est source de toute vie sur terre, une déesse créatrice primaire et juste envers ses créations. Elle fait écho à notre relation fondamentale à la nature et à tout ce qu’elle nourrit.
A l’origine de l’exposition, la volonté d’exposer le film expérimental, la volonté de (re)mettre en valeur cet art filmique qui est de l’ordre de l’expérimentation et de l’expérience définie comme quelque chose qui “ intervient au hasard sur un phénomène pour y provoquer l’apparition de faits, dont on n’a au début, aucune idée”. Ces films à visées contemplatives, poétiques, engagées, qui nous interrogent, nous bousculent dans la façon de percevoir le quotidien, les paysages naturels qui nous entourent, notre condition humaine, notre identité, notre corps. Nous nous retrouvons faces à elles et nous en faisons l’expérience. Expérience contemplative, parfois éprouvante, souvent déroutante. Autour de ces films expérimentaux, une pratique artistique avant tout, englobant installations, photographies, performances.
L’exposition se présente comme une promenade dans l’espace où dialoguent des artistes issues de différentes générations et de diverses pratiques artistiques. Les artistes présentées pour cette exposition abordent des thématiques fortes. Elles nous invitent à penser et à interroger notre rapport à la nature, au corps, à la mémoire, à l’identité.
Elles font portrait. Portraits contemplatifs de la nature érigée en événement, comme Une tempête dans un verre d’eau chez Eugénie Touzé. Portraits qui questionnent les frontières entre corps humain et végétal, À la recherche des amazones, chez Marcelle Thirache. Portraits de femmes enfermées, cloisonnées dans une Maison sans clé, en proie à un combat intérieur lié à la matérialité de l’espace qui les emprisonne et leur désir de liberté chez Marta Skoczeń. Portraits déroutants, psychédéliques de Coquelicots dansants, qui altèrent et ouvrent nos champs perceptifs chez Rose Lowder. Portraits sensoriels où corps humains et mondes vivants interagissent chez Bianca Lee Vasquez. Portrait double d’un intérieur sombre, cruel ouvert sur un extérieur lumineux et luxuriant, entre dedans et dehors, entre absence et présence chez Martine Rousset. Portrait d’une ville comme un corps lacéré, illustrant la condition et la destinée humaine chez Mariana Hahn.
Marilou Thirache
Curatrice de l'exposition
Les œuvres de Marta Skoczeń se présentent comme de réels récits visuels. Récits visuels empreints de douceur, nous plongeant dans des espaces où le temps est comme suspendu, figé, dans un moment de latence entre présence et absence. Récits visuels poétiques mettant en exergue la nature, l’extérieur comme espace de liberté et de risque et l’intérieur, le chez-soi, comme lieu de protection et de refuge. Les deux se présentant simultanément comme dangereux et réparateurs.
« J’avais envie de montrer ce besoin de mouvement qui pousse à sortir de la dimension sécurisante que représentent nos intérieurs en allant au contact de la nature. Cela me fait penser aux peintures d’artistes femmes du XIXème siècle où l’on voit des sujets féminins s’adonner dans des lieux clos, à tous types d’activités comme la couture. C’était des espaces naturellement assignés aux femmes à cette période. C’est cette image de la femme enfermée de l’intérieur que je souhaite libérer symboliquement. »
Instinctivement, Marta Skoczeń fait des femmes son sujet de prédilection. Dans la culture et l’histoire de son pays, la Pologne, la féminité est synonyme de puissance mais aussi de souffrances. Les photographies et vidéos de l’artiste représentent ces femmes ayant l’air enfoncées dans leur univers, comme désenchantées, au regard frontal mais fuyant. Psychologiques et transgressifs, ces portraits de femmes isolées en intérieur évoquent une puissance physique et émotionnelle et questionnent la position des femmes dans la société.
L’extérieur, la nature, quant à eux, sonnent comme des espaces thérapeutiques et libérateurs, permettant de remplir un vide. L’artiste construit des espaces de contemplation permettant à chaque spectateur.ice d’y voir un fragment manquant de leur passé. Cela se retrouve d’autant plus dans ses films, qui, par la continuité des plans projetés, font référence à la mémoire humaine qui peut parfois perdre son aspect linéaire. Le choix des endroits filmés par l’artiste est par ailleurs imprégné de son vécu, de son histoire. C’est une manière pour elle de retranscrire ses propres souvenirs modifiés par ses amnésies, au travers de sa mémoire associative. Photographier et filmer le dehors est pour elle “un acte fondé sur la faculté du corps à exprimer l’indicible qui doit être tiré de l’oubli”.
Les photographies et films de Marta Skoczeń ont été réalisés entre la France et la Pologne. Elle fait notamment écho dans son œuvre à la region d’où vient sa famille maternelle où elle passait la plupart de ses vacances. Il s’agit d’une petite ville dans le Sud de la Pologne, très calme et chaleureuse entourée par la campagne, des champs et des jardins. Mystérieuse car imprégnée d’histoires sombres et cachées, de non-dits. Baignée dans cet environnement où le poids du passé se fait ressentir, baignée dans cet environnement où la nature est éblouissante et omniprésente, Marta Skoczeń se découvre une passion pour l’art. D’abord pour le dessin, puis pour la photographie et le cinéma. Dessins, qui sont pour elle un point de départ à toutes ses œuvres dont elle dessine toujours les croquis avant réalisation.
Marilou Thirache
Galerie 7 rue de Paradis, Paris 10
Du 1er au 12 juin 2022
COMMISSARIAT : MARILOU THIRACHE
ARTISTES EXPOSÉES : Marcelle Thirache, Martine Rousset, Rose Lowder, Mariana Hahn, Marta Skoczeń, Bianca Lee Vasquez, Eugénie Touzé
vues d’exposition et de vernissage © Nicolas Fellingham Geyer